Cumulisme : Didier Guillaume miraculé, Patrick Labaune rechute et Hervé Mariton entre en phase terminale

Les élections départementales étant terminées, c’est l’occasion de faire un point sur la maladie du cumulisme qui touche nos élus, plus de deux ans après mon dernier article sur le sujet.  Eh bien à notre échelle locale, il y a du changement!

A commencer par un grand miraculé, désormais libéré, j’ai nommé Didier Guillaume, ex-président du conseil général de la Drôme et désormais plus que sénateur de la Drôme (et président du groupe socialiste et apparentés du Sénat, tout de même). Le département de la Drôme est repassé à droite mais si je parle de « grand miraculé », c’est parce que Didier Guillaume avait décidé et annoncé avant les élections, en janvier, qu’il ne se représentait pas pour ne plus se consacrer uniquement qu’à son mandat de sénateur.

Oui oui, le même Didier Guillaume qui affirmait dans Drôme Hebdo en janvier 2013,  « Je suis sénateur et président du Conseil général, ce sont les mêmes boulots », signalant son entrée dans la phase terminale de la maladie du cumulisme, déclarait deux ans plus tard dans le Dauphiné Libéré du 6 janvier 2015 :

« Les élus ne sont pas propriétaires de leurs mandats. Ils ne doivent pas se laisser happer par le pouvoir. Par ailleurs, il faut renouveler et rajeunir le personnel politique ». « Comme sénateur, je servirai la Drôme différemment, mais avec autant de conviction, de passion et d’enthousiasme ».

Quelle évolution en deux ans, de quoi redonner espoir à tous les cumulards invétérés! Je souhaitais à Didier Guillaume en 2013 une sortie digne du cumulisme, avant d’y être obligé par la loi. Elle y ressemble mais elle eût été plus élégante si elle s’était faite au moment où il est devenu premier vice-président du Sénat, ce qui a impacté quelque peu son agenda… (j’ai pu constaté ses absences à plusieurs CLIGEET pour ce qui est de mon expérience personnelle) plutôt qu’à la veille d’une cuisante défaite électorale. Lui qui avait prédit en janvier dernier qu’il y aurait au soir du 29 mars 11 cantons drômois à gauche et 8 à droite s’est bien planté puisque c’est exactement l’inverse qui s’est produit. Il devient du même coup le seul sénateur de la Drôme non cumulard puisque Gilbert Bouchet et Marie-Pierre Monier sont tous deux également maires.

Malheureusement, c’est un autre cumulard qui lui succède à la présidence du conseil désormais départemental de la Drôme : Patrick Labaune. Un récidiviste en plus, qui a déjà été maire de Valence et député plus de 4 ans, la dernière fois en 2004. Comme quoi la maladie du cumulisme peut rester latente pendant plus de 10 ans, bien camouflée, pour réapparaître brutalement, c’est vraiment terrible! Celui-ci est déjà connu pour son absentéisme à l’Assemblée Nationale. On imagine facilement qu’il va redoubler d’ardeur et remplir pleinement son mandat de député maintenant qu’il est président de conseil départemental. Autant dire qu’il présente tous les symptômes pour que son état empire rapidement…

Un autre dont l’état a définitivement empiré depuis deux ans, c’est Hervé Mariton, notre demi-député demi-maire. On aurait pu penser que sa disparition des écrans-radars locaux pendant 6 mois l’an dernier, le temps de faire un petit tour de France et de Navarre pour la campagne de la présidence de l’UMP, l’aurait amené à un peu d’humilité sur la question du cumul des mandats… Que nenni! Il a profité des vœux en début d’année pour réaffirmer haut et fort sur tous les tons, fier comme un paon :

Je suis député et maire et je désire le rester aussi longtemps que la confiance des électeurs me sera accordée.

Cela juste après les 6 pires mois de sa vie politique où il a été le moins actif dans ses mandats :

  • Ses absences réitérées à Crest ont été particulièrement remarquées et soulignées jusque dans la presse locale;
  • Il a réussi à rater un conseil municipal dont il détermine systématiquement la date à son bon vouloir 5 jours à l’avance;
  • Il n’a jamais mis les pieds au conseil communautaire de la Communauté de communes du Crestois et du Pays de Saillans – Coeur de Drôme alors qu’il y est élu depuis plus d’un an maintenant;
  • Il n’a pas été beaucoup plus actif à l’Assemblée Nationale à Paris, particulièrement en commission des finances, où il n’a été présent qu’à 7 séances sur 55 (dont 5 où il n’a pas ouvert la bouche), soit un taux de présence médiocre de 13%, et un taux de participation active pathétique de 4%;
  • Il a même réussi à rater une séance où était présenté un de ses propres amendements, le 26 novembre, qu’il n’a donc pas été en mesure de défendre.

Pas vraiment de quoi faire le kéké… comme dirait Patrick Labaune qui a décoché la semaine dernière cette amabilité à son collègue de parti dans le Dauphiné Libéré du 2 avril, en réponse à la question « Ses absences pointées du doigt à l’Assemblée nationale? (à Patrick Labaune) »:

« Je suis dans la moyenne! Je ne m’appelle pas Hervé Mariton, on me voit moins. Mais je vais vous dire… Parfois, pendant les questions (au gouvernement), moi j’y suis, mais Mariton, lui, il est déjà dans la salle des quatre colonnes pour répondre aux journalistes! »

Patrick Labaune se sous-estime puisqu’il a été présent à 10 séances de la commission de la défense nationale et des forces armées sur 28 à l’automne 2014, soit un taux de présence de 36%, près de 3 fois supérieur à celui de son collègue prestidigitateur crestois!

La cerise sur le gâteau? C’est que malgré son absentéisme et son taux de participation médiocre de 13% et 2 prises de parole seulement en commission des finances en 3 mois fin 2014, Hervé Mariton a été quand même grassement récompensé et s’octroie la troisième plus grosse réserve parlementaire pour l’année 2014 des près de 600 députés, plus de 250 000 euros pour sa pomme contre 130 000 euros pour l’immense majorité d’entre eux. Une somme qu’il justifie dans le Dauphiné Libéré du 14 février : « C’est parce qu’en tant que membre de la commission des finances, je ne relève pas du même dispositif (NDLR: mais alors duquel? on ne saura pas) », n’oubliant pas au passage de souligner qu’il est « particulièrement actif »! Il voulait bien sûr parler du dispositif « Je sèche les séances et j’encaisse la double réserve! » Et les journalistes comme le grand public n’y voient que du feu…

Mais la queue de la cerise sur le gâteau, c’est qu’il continue par ailleurs d’exiger des contreparties aux aides sociales comme le revenu minimum, et qu’il était tout content de pointer du doigt l’absence du « conseiller général sortant » à une réunion récente juste avant les élections. C’est l’hôpital qui se fout de la charité, ou la consécration du « faîtes ce que je dis, pas ce que je fais » qui rend si populaires nos hommes politiques de nos jours.

Incapacité à remplir ses mandats, quête désespérée d’en ajouter un supplémentaire (il écrivait: « Présider un parti, c’est y donner tout de soi le temps de son mandat » en oubliant qu’il en avait déjà deux, de mandats), tout en défendant le principe du cumul des mandats avec véhémence, propos incohérents… Ce sont bel et bien là tous les signes de la phase terminale de la maladie du cumulisme : la perte totale des repères! Celle-ci aura donc duré deux ans pour Didier Guillaume, combien durera-t-elle pour Hervé Mariton? Théoriquement deux ans également jusqu’en 2017 et l’application de la nouvelle loi sur le cumul des mandats… La suite au prochain épisode!

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A propos Yann Louvel

Citoyen du monde
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